Armand Benichou : « On pourrait aller encore plus loin avec les bailleurs sociaux »

Armand Benichou est président de l’association HandiToit. Un long partenariat avec les organismes Hlm lui a permis d’être un interlocuteur reconnu. La Charte d’engagement qu’il a signée fin 2018 avec une grande partie des acteurs locaux et l’Etat connait aujourd’hui une période de réalisation pour laquelle Armand Benichou attend les propositions des bailleurs. Pour autant, il ne compte pas s’arrêter là et voudrait bien mettre son expérience au service d’un partenariat privilégié pour le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie.

(photo HandiToit)

HandiToit a signé en septembre 2018 une charte d’engagement avec les principales collectivités de la région. Un comité des financeurs vient de se réunir, en juillet dernier. Qu’apporte-t-il de plus ?

La Charte pose une série d’engagements, le comité des financeurs, prévu dans la Charte, a validé des financements et cela va nous permettre de concrétiser un certain nombre de logements adaptés dans le programme des bailleurs sociaux. La Charte a précisé les orientations que chacun des signataires s’engage à mettre en œuvre pour faciliter l’accès à un logement des personnes en situation de handicap aussi bien que celles en perte d’autonomie liée à l’âge. Cette deuxième notion est importante parce que la population de notre région est de plus en plus âgée et va donc se trouver confrontée à de plus en plus de problèmes d’autonomie. Cela ne va pas se passer dans un futur hypothétique. Aujourd’hui même, dans le Vaucluse, le Var et les Alpes-Maritimes, près de 30 % des personnes ont plus de 65 ans.

La Charte énumère quatre grands axes de travail : améliorer la connaissance des besoins en logement de ces personnes, accompagner les collectivités pour la prise en compte de ces besoins, développer une offre de logements adaptés et enfin, favoriser le rapprochement de l’offre et de la demande. Elle a été signée par l’Etat et la Région, par les départements du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, par les métropoles d’Aix-Marseille et de Toulon, par la CAF et l’ARS, par la Caisse des dépôts, Action Logement, l’AR Hlm Paca & Corse et l’URAF Paca. Autant dire par une grande partie des acteurs du logement.

Le comité des financeurs a permis à certains signataires de s’engager à bonifier des logements adaptés pour les bailleurs sociaux qui respectent le cahier des charges élaboré par HandiToit. La Région apporte 5 000 € par logement, les métropoles (AMP ou TPM) 2 000 € de plus, et les départements doivent encore se positionner. Cela peut changer les choses de façon significative pour les bailleurs qui le plus souvent réalisaient des logements adaptés sans pour autant y installer la totalité des prestations prévues au cahier des charges d’HandiToit. C’est une incitation importante.

Y a-t-il déjà des opérations lancées ?

Pas encore. La Charte a été signée fin 2018, l’année 2019 a été celle de la mise en place et avec le confinement, on commence à peine quelques programmes. Les enveloppes sont loin d’avoir été consommées, on attend les dossiers des bailleurs.

Vous avez, de toute façon, depuis quelques années, des programmes qui se construisent régulièrement avec des logements adaptés…

Bien sûr. Nous sommes en discussion avec les bailleurs depuis près de 15 ans, grâce à Bernard Oliver, le président de l’AR Hlm, qui a su initier une relation de confiance entre nous. Et nous sommes dans une démarche de co-construction, avec des résultats réels. La quasi-totalité des bailleurs sociaux présents sur la région ont signé des conventions avec nous. En dix ans, 1 250 familles ont pu trouver un logement adapté qui leur permet de vivre en toute autonomie chez elles. C’est une vraie satisfaction pour moi, mais les besoins sont importants et nous devons aller encore plus loin, encore plus fort.

Plus loin, ce pourrait être quoi ?

Nous avons, par exemple, été sollicités par la DDTM des Alpes-Maritimes pour mettre en place le concept HQA (haute qualité d’accessibilité). Ils ont sollicité HandiToit pour que nous suivions la réalisation de dix unités HQA, à Nice, à Menton et à Mouans-Sartoux.

La particularité de ce concept est qu’il concerne bien sûr le logement, mais aussi les immeubles et l’environnement, c’est-à-dire l’espace public autour des immeubles aussi bien que les commerces alentour. Tout est fait pour faciliter la circulation des fauteuils, comme des poussettes pour enfants ou des gens avec des cannes. C’est un concept universel. On pourrait multiplier les cités HQA. Ce serait encore un progrès.

Vous croyez que ce soit possible ?

Nous serions partants, mais j’ai peur que ce soit difficile. En revanche, ce que nous pouvons faire de plus avec les bailleurs sociaux, ce serait travailler sur des projets visant au maintien dans le logement. L’Association régionale et l’ensemble des bailleurs ont toujours eu une écoute bienveillante à notre égard. Je leur lance cette proposition de travail. Nous sommes prêts à nous y investir, tout comme, d’ailleurs, dans la problématique de la réhabilitation de l’ancien. Maintenir les gens dans leur logement, c’est une part fondamentale de la mission sociale des Hlm et nous pouvons là aussi être un partenaire très positif. Nous pourrions également dupliquer des dispositifs de conciergerie en s’inspirant de la conciergerie sociale et solidaire « Voisin’âge » réalisée avec Erilia sur Marseille-Prado.

Action Logement a passé une convention avec nous en ce sens, pour réfléchir à des logements adaptés, partagés, regroupés. Par ailleurs, nous avions formalisé un projet d’habitat inclusif dès 2006, avec maintien à domicile, aides à la personne et suivi 24h/24. Nous avons la capacité d’intervenir aussi bien dans la conception de tels logements adaptés que dans la mise en œuvre et le fonctionnement quotidien. Ce serait une façon d’aller plus loin avec les bailleurs, en appui sur la confiance réciproque que nous avons su tisser au fil des ans.

BIO

  • Chef d’entreprise dans le bâtiment, à la tête d’une menuiserie aluminium, Armand Benichou devient handicapé à la suite d’un accident et fait construire lui-même sa maison en l’adaptant à ses besoins
  • Président de l’association HandiToit depuis 2001, il milite pour la construction de logements adaptés.
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