Comment développer les opérations d’acquisition-amélioration…

Armes imparables et essentielles pour revitaliser les centres anciens dégradés de nombreuses villes, les opérations d’acquisition-amélioration se heurtent à de nombreux obstacles, techniques et réglementaires, mais également financiers. La préfecture de Région et la DREAL ont souhaité rencontrer les bailleurs et l’Association régionale pour étudier des pistes d’évolutions.

Abadie avant-après © CDC Habitat

 Le 8 octobre dernier, l’Association régionale accueillait 5 bailleurs sociaux volontaires (13 Habitat, CDC Habitat social, Grand Delta Habitat, ICF Habitat et Vilogia) pour une rencontre avec la Dreal Paca. Un groupe régional de travail sur la question de l’acquisition-amélioration s’est mis en place en février 2021 et il s’agissait lors de cette rencontre du 8 octobre de soumettre ses premières conclusions au regard d’opérateurs en vue de formaliser des pistes d’évolutions législatives et réglementaires à soumettre au ministère du Logement.

Les bailleurs ont tout d’abord pointé, en amont, les modalités de captation des logements très souvent mis à la vente à des prix trop élevés. Ils demandent que la collectivité (commune ou intercommunalité) puisse bâtir une réflexion en amont avec les acteurs présents pour une vraie stratégie de long terme qui régule les prix.

Ils ont également insisté sur le rôle essentiel de l’ABF en souhaitant que ce dernier devienne un véritable partenaire dans les opérations d’acquisition-amélioration en centre ancien. Non seulement les ABF peuvent être des conseils avisés sur la lecture d’un quartier ou d’un bâti, mais ils portent également la parole de l’Etat et sont des relais importants auprès de tous les acteurs concernés. Les bailleurs voudraient que ces opérations de centre ancien soient considérées par les communes comme prioritaires au sens de l’intérêt général et qu’elles bénéficient d’un délai minimal d’instruction des permis.

Des exemples concrets

CDC Habitat social a présenté l’opération qu’il a mène depuis plus de dix ans sur l’ilot Abadie à Marseille, dans le quartier du Panier, il a notamment mis l’accent sur la grande variabilité du prix de revient tout au long de la vie d’une opération comme celle-ci. Alors même que le coût d’achat de l’immeuble au départ ne semblait pas poser problème, les nombreux événements intervenus au fil des années ont eu un impact important sur le coût final qui s’est considérablement alourdi en atteignant le niveau critique de 4 700 euros le mètre carré de surface utile.

Grand Delta Habitat pour sa part présente 28 opérations qui se sont étalées dans le temps sur les cinq derniers exercices et met en exergue plusieurs obstacles à la bonne réussite d’une opération d’acquisition-amélioration : le poids de la charge immobilière initiale, les normes d’accessibilité qu’il faut adapter aux contraintes du bâti existant, les délais très restreints de prise de décision pour le bailleur dans le cadre d’une DIA et la présence, possible ou non, de commerces en pied d’immeubles (parfois décisifs pour l’équilibre financier final de l’opération).

Des propositions non moins concrètes

Plusieurs pistes ont été évoquées au final par les bailleurs présents pour avancer dans l’efficacité et la réussite de telles opérations. En premier lieu, ils estiment qu’un travail en amont avec les élus est indispensable pour faire identifier par les services les logements objet d’une opération d’acquisition-amélioration. Cette démarche permet à la commune d’être moteur et partie prenante dès le départ.

Ensuite, le même type de partenariat doit être envisagé avec les ABF, dans une véritable logique de co-construction.

Pour maîtriser au mieux les coûts de construction, un rapprochement avec les syndicats professionnels et la fédération du BTP semble indispensable, ne serait-ce que pour instaurer le principe d’un appel préalable à des experts en amont de la phase de conception.

Les bailleurs demandent également à l’Etat de simplifier les dérogations en matière d’agréments de logements sociaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) notamment lorsqu’ils sont situés en centres anciens. Dans les cas où l’Anru intervient, il convient en effet de permettre aux ménages modestes de continuer à être logés dans ces quartiers à l’issue de la rénovation, pour éviter l’effet d’éviction. Le préfet pourrait avoir l’autorisation de prendre un simple arrêté pour permettre au délégataire des aides à la pierre d’y agréer les opérations de PLAI ou de PLUS.

La sécurité est aussi une demande essentielle des bailleurs : que la collectivité et l’Etat fassent en sorte que les immeubles vacants visés ne puissent pas être squattés.

De nouvelles règles dans le montage financier sont demandées par les bailleurs

Mais, sans trop de surprises, c’est l’aspect financier qui rassemble le plus grand nombre de propositions des bailleurs. Minimiser le coût de ces opérations, structurellement plus élevé que celui d’une construction neuve, est en effet un objectif crucial pour leur multiplication.

Les bailleurs estiment que les règles du montage financier d’une opération d’acquisition-amélioration doivent être différentes de celles des opérations dans le neuf. Ils suggèrent plusieurs pistes : baisser le taux de TVA et pourquoi pas, même, la supprimer pour ces opérations le plus souvent indispensables à la revitalisation des centres villes, envisager la possibilité de « réaliser » le capital à la fin de l’amortissement, attribuer un coefficient de majoration de la subvention en fonction des difficultés de l’opération (avec une grille de cotation ?), recalculer le montant des subventions lorsque l’opération est soldée, financer spécifiquement en tout ou partie la conduite d’opération et l’ingénierie…

On le voit, les services de l’Etat ont largement de quoi plancher sur toutes ces propositions concernant le financement. Mais il y a également des choix qui peuvent influer sur l’équilibre financier sans toucher aux règles en vigueur. Favoriser, quand le marché le permet, l’implantation de commerces en rez-de-chaussée, une piste à travailler peut-être avec les Chambres de commerce ou les syndicats de commerçants. De la même façon, la mixité des produits de logement proposés dans l’opération d’acquisition-amélioration est à privilégier avec un « mix » de logements locatifs sociaux, de logements en accession sociale type BRS ou PSLA, ou même de logements intermédiaires.

La DHUP (la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages au sein du ministère de la Transition écologique) s’est dite en attente de « propositions concrètes, étayées et argumentées ». La rencontre du 8 octobre à la préfecture de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur aura pu lui en fournir de nombreuses.

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