Vous êtes arrivée à Marseille en juin pour coordonner le Plan Partenarial d’Aménagement (PPA) qui va se déployer sur le centre-ville pour résorber l’habitat dégradé. Quelle va être la feuille de route de ce PPA ?
C’est encore trop tôt pour le dire. Il va nous falloir écrire tous ensemble la stratégie du PPA. Ce dispositif a été mis en place par la loi Elan et il est demandé par les collectivités locales, en l’occurrence ici, par la Métropole Aix-Marseille-Provence (AMP). C’est donc un contrat passé entre AMP la Ville et l’Etat pour mettre en place, justement, une stratégie globale d’intervention avec une vision d’ensemble sur un périmètre de 1 000 hectares. C’est énorme !
Ce PPA, baptisé « Marseille Horizons », est piloté par la Métropole, qui a d’ailleurs publié fin 2018 un projet stratégique de lutte contre l’habitat indigne, et l’Etat en sera le facilitateur, en termes d’ingénierie, de financements, de mise en place de leviers coercitifs s’il le faut, de liens entre ses services (DDTM, DDCS, ARS, Préfecture…), de coordination avec l’Anah ou la CAF, bref, ma mission consiste à accompagner, à aider, mais aussi à veiller à la pertinence du projet, au respect du calendrier, au bon déroulement du PPA en coordination avec tous les intervenants et en co-production avec les habitants.
Ce sera donc la Métropole qui va réaliser, concrètement, les opérations du PPA ?
Nous allons créer un opérateur dédié, une SPLA-IN (Société Publique Locale d’Aménagement d’Intérêt National), dont les actionnaires seront l’Etat et la Métropole. Les statuts sont rédigés, elle sera créée à la fin de l’année. On pourra alors travailler sur le fond, avec du personnel mis à disposition par la Métropole, pour établir une sorte de préfiguration. D’ores et déjà la Métropole a proposé de fixer un périmètre de « Grande Opération d’Urbanisme », une « GOU » telle que définie dans la loi Elan, à l’intérieur duquel c’est elle qui aura toute la compétence pour intervenir et non plus la ville. Mais nous avons défini ensemble quatre secteurs prioritaires sur lesquels il faudra intensifier l’intervention de façon à ce qu’elle soit efficace et lisible le plus rapidement possible. Ces quatre secteurs sont Noailles-Ventre (116 immeubles concernés), Noailles-Delacroix (58 immeubles), Clovis Hugues-Belle de Mai (103 immeubles) et Hoche-Versailles (37 immeubles). Un premier comité de pilotage se réunira le 22 octobre(1).
Nous allons faire avancer ce PPA « Marseille Horizons » le plus rapidement possible, mais nous sommes dans des opérations d’urbanisme et vous savez que le temps de l’urbanisme est long. Nous avons signé pour 15 ans, mais il faudra peut-être 20 ou 25 ans pour arriver au bout. Ce qui n’empêche pas des réalisations plus rapides, bien sûr, et c’est pour ça que nous avons identifié quatre secteurs prioritaires.
Il faut rester convaincu que la ville peut, et va, se transformer. Je viens de Perpignan, j’ai vu le centre-ville se transformer au fil des années. Mais il faut savoir que ce temps est nécessaire. Ça va être difficile. Comme disait un philosophe, « c’est le difficile qui va être le chemin ». Mais c’est possible, j’en suis persuadée.
Vous parliez d’une coproduction des projets avec les habitants ?
Absolument. Cela fait partie des 11 objectifs de Marseille Horizons, « mettre en œuvre un dispositif de concertation qui doit être au cœur des projets », c’est le 2ème point. Et le 3ème point stipule « construire une stratégie pour le relogement et l’hébergement temporaire », car il est question de maintenir les populations en place une fois les travaux réalisés. Il y aura bien sûr des programmes de logement social qui devront être lancés.
Quelle sera, justement, la mission dévolue aux bailleurs sociaux dans la mise en œuvre de ce PPA ? Ils ont déjà fait part de leur volonté d’être des partenaires actifs.
Ils le seront. Je souhaite les associer de façon globale et bien en amont. Il faut qu’ils participent à la mise en place de la stratégie et qu’on définisse avec eux, en concertation, les modes d’intervention et les objectifs que nous nous fixons mutuellement. Je pense que les organismes Hlm ne sont pas simplement là pour construire des logements, mais qu’ils ont toute capacité à inventer de nouveaux usages, à innover, à produire des habitats différents pour répondre aux enjeux auxquels nous sommes confrontés. Ils devront être une véritable force de proposition.
(1) L’interview a été réalisé avant ce premier comité évoqué en brève, lequel a permis de lancer officiellement le PPA
Biographie :
Muriel Joer le Corre est titulaire d’un DESS d’administration locale et d’un DESS d’urbanisme, aménagement et développement local.
Elle a été directeur général de l’OPH Perpignan Méditerranée de 2005 à 2011, puis directeur général des services de la ville de Perpignan de 2011 à 2014.
En mai 2014, elle rejoint la direction du Pôle économie, formation, cohésion sociale de la région Guyane, en tant que directeur général adjoint et cumule cette fonction à partir de 2016 avec celle de directrice adjointe fonctionnelle de la DREAL Guyane.